Comment parler de la mort aux enfants, par Patrick Ben Soussan, pédopsychiatre

 

Patrick Ben Soussan, pédopsychiatre

La chronique de Patrick Ben Soussan, pédopsychiatre

 

La mort fait partie de ces grandes questions taboues dans le dialogue avec les enfants. Les parents sont persuadés que parler avec son enfant de ce qui fait mal risque de le traumatiser à vie. Mais les mots ne tuent pas et il faut arrêter de mettre les enfants sous cloche. Nous devons les préparer à affronter épreuves et difficultés. C’est pourquoi, très tôt, les parents doivent parler de tout ce qui fait la vie. Pour un enfant de 7-10 ans, la question de la mort s'inscrit par ailleurs dans sa grande quête de savoir, c'est l'âge où on veut tout comprendre de ce qui fait la vie. Et parler de la mort, c’est parler de la vie.

 

Etre simple et clair

 

Lorsqu’un décès survient, il ne faut pas chercher à employer le bon mot ou à trouver une belle image. Il faut se mettre à la portée de l’enfant et lui donner des éléments qu’il peut comprendre clairement. Des images comme « papa est parti pour un long voyage, mamie s’est endormi pour toujours » n’ont pas de sens pour un enfant. Leur dire « il ne pourra plus faire la course avec toi », « tu ne le verras plus » ou « ses câlins vont nous manquer » aura plus de résonance. Chaque enfant est capable d’interpréter ce qu’on lui dit avec son niveau de connaissances et de développement. Il est faux de penser qu’un enfant confronté à la mort, d’autant d’un proche, sera un adulte malheureux, tout comme il est faux aussi de penser que les enfants peuvent traverser ces drames sans heurts. L’épreuve a été vécue et rien ne pourra l’effacer.

 

Etre attentif à ses réactions

 

Chaque enfant réagira différemment, à l’annonce d’un décès, en puisant selon sa personnalité et la dynamique familiale. Il peut être triste, abattu, renfrogné, mutique, mais aussi témoigner d’une véritable colère. Ces comportements induisent souvent beaucoup d’incompréhension de la part des parents. Quand les difficultés durent, il faut s'inquiéter de l'isolement, de la rupture des passions ; il faut être attentif au sommeil, à l’appétit, aux résultats scolaires.

 

L’enfant n’est pas un thérapeute

 

Il faut aussi savoir que si la mort touche un proche, l’enfant est parfois promu thérapeute, consolateur. Il arrive parfois qu’il se sente responsable de cette mort survenue, intimement persuadé qu’il y est pour quelque chose. Il peut se morfondre longtemps dans cette culpabilité qui l’empêche de grandir et de vivre. Prenez donc le temps d’écouter ce que les enfants nous disent, ils ont à être reconnus dans leur parole et leur douleur.

 

Des livres pour en parler ou y réfléchir :

Pour les enfants : Envolée, Corinne Dreyfus, Paris, éditions Frimousse, 2012 (album sans texte)

Pour les adultes : L'enfant confronté à la mort d'un parent, sous la direction du Dr Patrick Ben Soussan, Toulouse, éditions Erès, 2013.